Dans la loi climat et résilience votée en 2021, le législateur a posé un objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) en 2050 et, pour les dix années qui viennent (2021-2031), une réduction de moitié de l’artificialisation par rapport aux dix années précédentes. Les contraintes commencent donc dès maintenant. Les maires ont mal vécu l’adoption de ce texte d’autant plus que les deux décrets du premier ministre, édictés le 29 avril 2022, semblent aller à l’encontre de ce qui avait été voté dans la loi de 2021. En tout cas, c’est ce que pensent les sénateurs qui ont adopté, en mars dernier, une proposition de loi qui assouplit certaines des contraintes. Les deux décrets de 2022 qui définissent notamment les espaces artificialisés et ceux qui ne le sont pas sont si contestés que l’AMF a introduit un recours pour excès de pouvoir pour obtenir leur annulation. Le mécontentement des maires s’appuie sur plusieurs motifs : la réduction de moitié de l’artificialisation par rapport aux dix années précédentes, ce qui signifie que les territoires qui n’ont pas été vertueux disposent de plus de possibilités de construire que ceux qui ont peu construit. La conséquence de ce principe paraît injuste. Autre cause de mécontentement : une commune qui doit rattraper un retard de construction de logements sociaux peut être dans une situation où ses possibilités de construire vont être absorbées par ce rattrapage. Les maires ont donc l’impression d’être en présence d’impératifs contradictoires. Par ailleurs, la mise en œuvre de l’objectif ZAN se fait de façon descendante : la région fixe des objectifs dans le SRADDET (schéma d’aménagement et de développement durable du territoire). Ces objectifs doivent être retranscrits dans le Scot et redescendre enfin dans le PLU communal, intercommunal ou la carte communale. La loi indiquait que les documents d’urbanisme devaient prendre en compte les objectifs du SRADDET. Le décret du 29 avril parle lui de compatibilité. Or, le rapport de compatibilité entre deux normes est plus contraignant qu’un rapport de prise en compte. Pour préparer le SRADDET, les régions ont consulté la conférence des Scot ce qui est une bonne initiative mais qui exclut de la consultation les communes non couvertes par un Scot. De fait, les sénateurs souhaitent la création d’une instance de consultation plus large que cette conférence des Scot et dans laquelle les élus des communes et des intercommunalités seraient majoritaires : il est illogique, selon eux, que la définition de l’objectif ZAN repose sur la région qui est une collectivité territoriale assez éloignée de la compétence d’urbanisme. Ils veulent également que les grands travaux de l’Etat soient exclus du calcul de l’artificialisation car ils risquent d’absorber une bonne part de l’artificialisation possible. Enfin, ils souhaitent que toute commune ait un droit de construire un hectare ce qui n’aura pas pour effet comme le dit le ministre d’artificialiser 38 000 hectares car toutes les communes ne construisent pas. La suite est entre les mains de l’Assemblée nationale.
Marc GIRAUD le 29 juin 2023 - n°458 de Urbanisme Pratique