Les renforcements des pouvoirs de la commune à l’égard des copropriétés dégradées Abonnés
Une collectivité territoriale pourra solliciter l’expropriation d’un immeuble à titre remédiable. Depuis la loi Vivien de 1970, les immeubles ayant fait l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité ainsi que d’une décision de démolition ou d’interdiction définitive d’y habiter peuvent être expropriés. En revanche, par principe, les immeubles dégradés à dégradés de manière remédiable ne pouvaient pas faire l’objet d’une expropriation. Cependant, l’expropriation de ces immeubles sera désormais possible lorsque les trois conditions suivantes seront réunies :
« 1° L’immeuble a fait l’objet, au cours des dix dernières années, d’au moins deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité ayant prescrit des mesures propres à remédier à la situation qui n’ont pas été intégralement exécutées ou à l’exécution desquelles il a dû être procédé d’office.
2° Des mesures de remise en état de l’immeuble s’imposent pour prévenir la poursuite de la dégradation de celui-ci. Leur nécessité est attestée par un rapport des services municipaux, intercommunaux ou de l’Etat compétents ou d’un expert.
3° Lorsque l’immeuble est à usage d’habitation et occupé et que la réalisation des travaux de remise en état ou la préservation de la santé et de la sécurité des occupants justifie une interdiction temporaire d’habiter, un projet de plan de relogement et, le cas échéant, d’hébergement est établi en application des articles L. 314-2 à L. 314-9 du code de l’urbanisme » (art. L. 512-1, code de l’expropriation).
Droit de préemption
La commune peut instituer le droit de préemption pour mener une opération d’aménagement (art. L. 210-1, code de l’urbanisme). Or, une interprétation restrictive de ces dispositions par le juge peut empêcher l’utilisation d’un tel droit pour mener une opération sur une copropriété dégradée. Aussi, pour éviter toute interprétation restrictive, la loi prévoit désormais que le droit de préemption peut être utilisée en vue de la réalisation des opérations programmées d’amélioration de l’habitat prévues à l’article L. 303-1 du même code, pour la réalisation des plans de sauvegarde prévus à l’article L. 615-1 dudit code ou des opérations de requalification de copropriétés dégradées prévues à l’article L. 741-1 du même code (art. L. 211-2, code de l’urbanisme).
La commune pourra imposer un diagnostic structurel des copropriétés
Il n’existait jusqu’ici aucune obligation à la charge des immeubles déjà soumis au statut de la copropriété de faire procéder à un DTG (diagnostic technique global), ni à aucun autre diagnostic préventif permettant de vérifier la solidité de l’édifice. En revanche, tous les immeubles à destination partielle ou totale d’habitation soumis au statut de la copropriété de plus de quinze ans doivent élaborer un projet de plan pluriannuel de travaux, actualisé tous les dix ans (article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis). Le recours à un tel projet de plan n’est cependant pas nécessaire si le DTG ne fait apparaître aucun besoin de travaux au cours des dix années qui suivent son élaboration. Le projet de plan pluriannuel de travaux est établi par une personne qui dispose des compétences et des garanties prévues par décret. En sa qualité d’autorité de police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, des locaux et des installations, le maire peut, à tout moment, demander au syndic de lui transmettre le plan pluriannuel de travaux pour vérifier que les travaux programmés permettent de garantir la sauvegarde de l’immeuble et la sécurité de ses occupants. En cas de défaut de transmission, l’autorité administrative peut élaborer ou actualiser d’office le projet de plan pluriannuel de travaux en lieu et place du syndicat des copropriétaires et aux frais de ce dernier.
Dorénavant, la commune pourra définir des secteurs dans lesquels tout bâtiment d’habitation collectif doit faire l’objet d’un diagnostic structurel du bâtiment à l’expiration d’un délai de quinze ans à compter de sa construction et au moins une fois tous les dix ans. Le diagnostic structurel comporte une description des désordres observés qui portent atteinte à sa solidité et évalue les risques qu’ils présentent pour la sécurité des occupants ainsi que celle des tiers.
La loi donne les critères qui doivent guider la commune lorsqu’elle délimite un secteur.
Sont ainsi concernées, les zones caractérisées par une proportion importante d’habitat dégradé ou présente une concentration importante d’habitat ancien dans lesquelles les bâtiments sont susceptibles de présenter des fragilités structurelles du fait notamment de leur époque de construction, de leurs caractéristiques techniques et architecturales, des matériaux de construction employés ou de l’état des sols.
de plus « Les périmètres des secteurs concernés sont indiqués sur un ou plusieurs documents graphiques annexés au PLU ou à la carte communale.
Ce diagnostic est élaboré par une personne qui justifie de compétences et de garanties définies par décret en Conseil d’Etat.
Pour les immeubles à destination totale ou partielle d’habitation soumis au statut de la copropriété, l’obligation de réaliser un diagnostic structurel de l’immeuble est satisfaite par l’élaboration du projet de plan pluriannuel de travaux mentionné à l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Dans ce cas, la personne ayant élaboré le projet de plan pluriannuel de travaux justifie des compétences et garanties définies par le décret en Conseil d’Etat mentionné au sixième alinéa du présent article.
Le propriétaire de l’immeuble ou, pour les immeubles soumis au statut de la copropriété, le syndic transmet le diagnostic ou, le cas échéant, le projet de plan pluriannuel de travaux à la commune.
A défaut de transmission du diagnostic ou, le cas échéant, du projet de plan pluriannuel de travaux en faisant office, le maire peut, dans le cadre de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations prévus au titre Ier du livre V du présent code, demander au propriétaire ou au syndic de le lui produire.
A défaut de transmission dans un délai d’un mois à compter de la notification de la demande, le maire peut faire réaliser d’office le diagnostic en lieu et place du propriétaire ou du syndicat des copropriétaires et à ses frais » (art. L. 126-6-1.code de la construction).
Permis de diviser
La loi Alur a créé une autorisation préalable de diviser, c’est-à-dire un permis de diviser (art. L. 126-18, code de la construction et de l’habitation). En vertu de l’article L. 126-18, une autorisation préalable aux travaux qui entraînent la création de plusieurs locaux à usage d’habitation dans un immeuble existant peut être instituée par l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, par le conseil municipal dans les zones qui présentent une proportion importante d’habitat dégradé ou encore dans lesquelles l’habitat dégradé est susceptible de se développer. Le président de l’EPCI ou le maire peut refuser l’autorisation lorsque les locaux à usage d’habitation créés sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité des occupants et à la salubrité publique.
Il est loisible aux EPCI ou aux communes compétentes en matière de document d’urbanisme de délimiter, dans le PLU, des zones soumises à l’autorisation préalable de diviser. L’autorisation préalable peut ainsi être refusée lorsque les locaux à usage d’habitation créés par la division ne respectent pas les proportions et tailles minimales fixées par le PLU(i) (art. L. 126-19, code de la construction et de l’habitation). A la différence de l’article L. 126-18 du code de la construction et de l’habitation, l’institution de l’autorisation n’est pas subordonnée à l’existence d’un habitat dégradé.
Ces dispositions ne visent donc pas les situations de colocations à baux multiples alors que celles-ci constituent pourtant bien une division de logement au sens des articles L. 126-17, L. 126-18 et L. 126-21 du code de la construction et de l’habitation (article 8-1-II de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989) auxquels elles doivent se conformer. Toute division visant à mettre à disposition des locaux à usage d’habitation d’une superficie et d’un volume habitable inférieurs respectivement à 14 m² et à 33 m3 est ainsi interdite (art. L. 126-17 code de la construction et de l’habitation). L’article 141 de la loi ELAN a cependant introduit une exception à ces seuils pour les colocations à baux multiples afin d’harmoniser la réglementation avec celle en vigueur s’agissant des logements décents (Décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent). Dans ce cas, les seuils sont donc fixés à 9 m² et 20 m3.
Le maire pourra autoriser les colocations à baux multiples
La loi renforce les pouvoirs du maire à l’égard de ces colocations. Aussi, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi, le président de l’EPCI ou, à défaut, le maire peut rejeter la demande présentée en vue d’une colocation formalisée par la conclusion de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur lorsqu’un examen préalable du logement et des contrats établit que les caractéristiques du logement et des baux ne permettent pas de garantir aux occupants des conditions d’existence dignes dans les zones soumises au permis de louer (art. L. 635-1, code de la construction et de l’habitation). Notons que le maire peut refuser de délivrer son autorisation même si les normes de décence sont respectées. Il devra motiver sa décision de rejet de la demande d’autorisation et préciser la nature des mesures, travaux ou aménagements prescrits pour satisfaire aux exigences déjà citées.
Michel Degoffe le 16 mai 2024 - n°477 de Urbanisme Pratique
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