Du bon usage de la carte communale Abonnés
La carte peut prévoir les aménagements ou des créations d'annexes et d'extensions des constructions existantes
Ainsi, la carte communale de Buais (Manche) précise que " la zone naturelle N est une zone strictement réservée à l'agriculture et à la protection des sites et des espaces naturels. / Les constructions liées à l'exploitation agricole (...) seront autorisées sous réserve d'être conformes aux dispositions du règlement national d'urbanisme. De même, les aménagements des constructions existantes et les créations d'annexes et d'extensions des constructions existantes seront permises. Dans cette zone, les permis de construire concernant l'habitation sous toutes ses formes (résidences principales, secondaires, abris de week-end, maisons mobiles) devront être refusés en application des articles du règlement d'urbanisme visés ci-après : R. 111-13 ; R. 111-14-1 ; R. 121-21…
Il en résulte que le maire ne pouvait pas délivrer un permis de construire dans cette zone N autorisant la transformation d’un bâtiment agricole construit pour l'essentiel en tôles et comportant une petite partie à usage de garage constituée de murs en parpaings, en une habitation de trois pièces, entièrement construite en parpaings, surmontée d'un toit à deux pentes en ardoise, d'une surface et d'un volume quasiment identiques. Le projet, compte tenu de la vétusté et de l'état de délabrement du bâtiment existant, doit être regardé, non comme l'aménagement d'une construction existante au sens des dispositions précitées de la carte communale de Buais, mais comme une construction nouvelle à usage d'habitation non autorisée dans cette zone par ces mêmes dispositions (CAA Nantes 19/04/2013, n°11NT02878).
Le juge exerce un contrôle sur le classement effectué
Par une délibération du 7 septembre 2007, le conseil municipal de Quéménéven (Finistère) a approuvé la carte communale. Un propriétaire conteste le classement de son terrain en zone inconstructible. La cour administrative lui donne raison. Elle rappelle qu’il appartient aux auteurs d'une carte communale de déterminer le parti d'aménagement à retenir en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, la commune n’est pas liée par les modalités existantes d'utilisation des sols ; elle peut prévoir la modification des utilisations existantes dans l'intérêt de l'urbanisme. Mais en tout état de cause, le juge administratif pourra annuler le classement s’il lui paraît entaché d'une erreur manifeste ou fondé sur des faits matériellement inexacts. En l’occurrence, dans cette affaire, la commune a commis une telle erreur : la parcelle aurait dû être classée constructible ; elle est située dans la partie sud du secteur de la Gare, lequel correspond à l'un des trois pôles principaux d'habitat de la commune de Quéménéven. La parcelle, entièrement «artificialisée» et bâtie, accueille, sur sa majeure partie, des constructions de taille importante. Elle est bordée et desservie notamment par la route du Porzay (route départementale n° 61), sur l'accotement de laquelle elle possède des accès aménagés, ainsi que par les réseaux publics. De fait, la parcelle n’est pas enclavée. La cour rappelle également qu’elle était antérieurement classée en zone Uh du POS. Il arrive donc que des communes passent du POS à la carte communale (CAA Nantes 5/04/2013, n°11NT02567).
La carte communale peut permettre de freiner une urbanisation désordonnée
Un propriétaire conteste le classement en zone inconstructible de son terrain par la carte communale de Monbahus (Lot-et-Garonne). Saisie du recours, la cour administrative constate que le rapport de présentation de la carte communale expose qu'en raison de la faible évolution de la population de la commune et des besoins en termes de terrain à bâtir d'ici 2015, ses auteurs entendent circonscrire le développement des constructions au centre du bourg et mettre un terme à l'évolution de l'urbanisation linéaire le long des voies et dans le prolongement des hameaux existants. Ainsi, les auteurs de la carte communale n'ont pas voulu développer l'urbanisation le long du chemin départemental n° 241, qui dessert le lieu-dit " Les Ringauds " où est située la parcelle en raison de la dangerosité des accès à ce chemin départemental. Ce parti d’aménagement paraît cohérent. La parcelle de l’intéressé est située nettement à l'extérieur du centre aggloméré du bourg de Monbahus, à une distance de 450 mètres environ, dans un secteur à dominante rurale. Eu égard à ses caractéristiques et à sa localisation, le classement de la parcelle en zone inconstructible, conforme aux partis d'aménagement retenus par les auteurs de la carte communale, n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, alors même qu'elle ferait partie d'un hameau composé de sept maisons (CAA Bordeaux 7/02/2013, n°11BX03354).
Le zonage doit être en cohérence avec le parti d’aménagement
Un propriétaire conteste la carte communale d’Ecromagny (Haute-Saône) parce que son terrain n’y est pas classé en zone constructible. La cour administrative constate qu’il ressort du rapport de présentation que la commune entendait procéder à une faible urbanisation de son territoire, n'envisageant qu'une croissance de sa population actuelle de 45 habitants à l'horizon de l'année 2017. C’est pourquoi elle n’a classé en zone constructible que 21 hectares, soit 3,1 % du territoire communal, dont 1,4 hectare seulement concernait huit nouvelles parcelles ouvertes à l'urbanisation. Pour préserver le caractère rural de la commune, le choix de leur localisation a traduit un parti d'aménagement clair qui visait à densifier le bourg actuel tout en permettant de modestes extensions des constructions isolées du plateau des mille étangs et à résolument « éviter le développement anarchique au coup par coup sans logique urbaine et le mitage urbain, modèle qui a eu tendance à s'imposer sur le territoire avec des constructions s'implantant au gré des étangs ou des fermes isolées ». Compte tenu de ce parti d’aménagement, la cour administrative considère que le classement est justifié (CAA Nancy 22/11/2012, n° 11NC01533).
Conseils : dans une autre affaire, la cour administrative rappelle les principes qui doivent guider une commune quand elle élabore son document d’urbanisme (cela vaut aussi pour un PLU) : « il appartient aux auteurs d'un document d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ».
Mais, la cour administrative constate que la commune de Marquay (Dordogne) n’a pas respecté ces principes en adoptant sa carte communale : la délibération approuvant la carte communale fait état de la recherche d'un équilibre entre des capacités d'urbanisation suffisantes pour satisfaire les besoins prévisibles en logements, la préservation des zones d'activités agricoles existantes, et la protection des milieux naturels, des paysages et des sites. Or, le classement en zone constructible des parcelles n° 122, 124, 131 et 132 ne répond pas au parti pris affiché : elles sont en limite d'un massif entièrement boisé, et ne sont pas suffisamment proches de deux habitations et d'une petite résidence de tourisme pour appartenir au secteur déjà urbanisé de la commune, ou dont l'urbanisation ne porterait pas atteinte au caractère naturel des lieux. Le maire n’établit pas non plus que l'ouverture de cette zone à l'urbanisation serait indispensable au développement de la commune. La commune a donc commis une erreur manifeste d’appréciation en classant ces terrains en zone constructible (CAA Bordeaux 9/11/2010, n° 10BX00047).
La carte communale ne couvre pas nécessairement l’intégralité du territoire communal
Saisi par un propriétaire, le tribunal administratif a annulé une délibération du conseil municipal de Saint-Paul-de-Fourques (Eure) approuvant la carte communale en ce qu’elle classe sa parcelle en zone non constructible. Cela signifie que, pour le reste, la carte demeure légale et en vigueur. A cette occasion, la cour administrative précise les obligations de la commune après l’annulation partielle d’une carte communale. Selon la cour, il résulte de l'article L. 124-1 du code de l'urbanisme qu'une carte communale a uniquement pour objet de préciser les modalités d'application des règles générales d'urbanisme prises en application de l'article L. 111-1 du code de l’urbanisme. En l'absence de carte communale, ces règles s'appliquent de plein droit.
Aucune disposition législative ou réglementaire et, notamment pas l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme, ni aucun principe n'imposent à la différence des PLU, qu'une carte communale couvre l'intégralité du territoire d'une commune ou même, qu'en cas d'annulation partielle par voie juridictionnelle d'une carte couvrant l'intégralité du territoire, l'autorité compétente précise de nouveau les modalités d'application des règles générales d'urbanisme pour les secteurs du territoire communal concernés par l'annulation. Par conséquent, l'annulation partielle de la carte communale de la commune de Saint-Paul-de-Fourques, en tant qu'elle classe en zone non constructible la parcelle en cause, n'appelle aucune mesure d'exécution (CAA Douai 17/02/2011, n°10DA01265).
Marc GIRAUD le 30 mai 2013 - n°235 de Urbanisme Pratique
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